Ivan Cappelen - 174
Ivan Cappelen avait décidé de poser ses bagages à Illys pour son dernier meeting. La place était comble, c'est à dire qu'il y avait un peu moins de 4000 personnes devant lui. Il faisait un peu froid mais pas tant que ça. En tout cas, ça n'empêchait pas les gens d'être là et c'était le principal.
Il été arrivé jusqu'à la scène en passant entre le gens, aucun couloir n'avait été préparé et avec des camarades qui s'occupaient de sa protection, il avait fendu la foule en prenant bien soin au passage de serrer de main, de sourire de ses plus belles dents et de remercier chaque personne qui lui disait des compliments. Il été arrivé sur scène et la musique de campagne avait été lancée.
Ivan salua la foule et quand la musique s'estompa, il se lança.
Ivan Cappelen : Chers amis, chers compatriotes !
Pour ce dernier meeting, je ne vais pas cracher sur mes adversaires, je ne vais pas revenir sur le bilan de mes adversaires, je ne vais pas critiquer tout ce qui a été fait avant moi, non, pour ce dernier meeting je ne veux parler que de ce qui vous intéresse, que de l'avenir de notre pays. Je ne veux pas ruminer le passé, je veux aller de l'avant. Tous mes adversaires n'ont fait que critiquer, critiquer, critiquer et dire qu'il fallait faire table rase de ce que j'ai fait, je ne leur en veux pas, et je ne jouerais pas à ce petit jeu, pas aujourd'hui. Aujourd'hui, ce qui importe pour notre pays, c'est la perspective que nous voulons lui donner. Vous savez déjà les analyses et les critiques que j'ai tiré de mes six premières années à la tête de notre pays.Vous savez déjà qu'est-ce que j'améliorerais sur ce que j'ai déjà fait et sur mes erreurs passées. Mais osons parler de ce qui n'a pas été entreprit encore. La lutte pour l'indépendance et la force de notre Etat. Vous n'ignorez pas que le pouvoir n'est plus l'apanage du Pouvoir depuis un certain temps et qu'il y a dans notre société différentes formes de pouvoir. Je passerais les pouvoirs médiatiques et informationnels, non pas qu'ils sont inintéressant mais il serait d'un autre ressort d'en parler. Ce n'est pas mon rôle, mon Conseil a émancipé la presse et l'information, ce n'est pas pour que je donne mon petit avis de ce que devrait être le journalisme saphyrien et la position des intellectuels. Le pouvoir dont je veux parler, il est d'abord économique et le second est communautariste. Le premier transcende le monde capitaliste, le second n'est qu'une part du chez nous, transformé en chez eux.
Parlons d'abord du communautarisme. Pourquoi ? Comment ? Qu'est-ce ? Déjà définissons-le par la négation pour déflouer les frontières, puis nous le définirons convenablement pour en préciser les contours. Le communautarisme ce n'est pas le fait qu'il y ait une plus grande concentration d'habitants d'une certaine religion ou d'une certaine origine dans un quartier. Le communautarisme, ce n'est pas celles et ceux qui refusent de participer aux initiatives publiques ou de s'engager au sein des infrastructures d'Etat. Le communautarisme c'est bien plus, et bien moins que cela. Le communautarisme c'est d'abord la conséquence directe d'un désengagement de l'Etat qui ne pourvoit plus aux demandes d'assistance et d'accompagnement d'un groupe défavorisé. Le communautarisme ne naît pas contre l'Etat, il naît à défaut de l'Etat. Le sentiment virtuel de communauté et d'identité envers et contre tous, ce n'est pas une création détachée de la réalité qui ne se meut que par des idées. C'est une réaction de survie sociale face à des conditions matérielles défavorables. Ce sentiment n'est pas inné à une culture étrangère ou à une religion, il naît d'un rejet viscéral de l'intégration et de l'assimilation. Lorsque notre Etat échoue à intégrer l'identité dans la société et à assimiler le comportement des nouveaux citoyens alors le communautarisme devient une nécessité sociale pour les exclus qu'on parque dans des immeubles insalubres, des tours d'immeubles de logement précaire, dans des quartiers immondes et bâtis rapidement par les localités pour exclure de l'accès aux services publics, de la vie sociale, et des centres d'activités, de larges pans de populations présentées sous le prisme de la monstruosité et de l'altérité dépréciative.
Pour contrer ce phénomène, nous proposons le réengagement de l'Etat dans les affaires princières et communales. Nous devons offrir les moyens à toutes les localités de construire des logements salubres, de construire des antennes de service public dans tous les quartiers, nous devons offrir aux abandonnés de la république -au sens littéral du terme- les moyens de sortir de l'abandon et de réintégrer la société, en en assimilant les principes de vivre-ensemble qui forge toute collectivité.
Le deuxième pouvoir contre lequel je m'engage à réinvestir l'Etat dans la lutte de suprématie, c'est le pouvoir de l'argent et de la finance. Vous n'ignorez pas mon engagement le plus total contre les puissances de l'argent et vous devez savoir que je combattrais jusqu'au bout les multinationales et les grands holdings et autres groupes financiers. La finance est devenue le maître des marionnettes de l'économie, l'économie réelle est devenue un jouet pour les spéculateurs et l'on ne peut pas laisser faire cela ! Cependant on ne peut décider du jour au lendemain de se passer d'économie, nous sommes des communistes, c'est-à-dire des socialistes scientifiques et non utopistes. Nous avons donc une approche méthodique de la sortie de l'économie capitaliste et financiarisée. D'abord nous allons bouter la finance des biens communs les plus essentiels, comme nous projetons de le faire dès notre réélection concernant l'eau dans un premier temps, puis les productions agro-alimentaires dans un second temps. Nos marchandises quitteront les étalages de la bourse mondiale. Les prix risqueraient donc d'augmenter me direz vous. Sauf si nous contournons avec les pays du tiers monde le système boursier et que nous échangeons toujours au même prix, nos denrées. Ce serait un échange direct gagnant-gagnant qui mettrait un coup de pied bien placé au système financier international et notre retrait qui entraînerait une hausse des prix sur le marché mondial, poussera tous les pays à quitter ce système petit-à-petit et à rejoindre un système solidaire d'économie mondiale dont nous impulserons le mouvement.
Mais restons sur le plan national, pour lutter contre les puissances de l'argent et de la finance, nous définanciariserons de grands pans de l'économie pour les mettre hors d'atteinte des jeux de spéculation. Dans le même temps que nous organiserons de grandes nationalisations pour protéger les secteurs de l'Etat qui doivent servir l'intérêt commun et non les intérêts de quelques uns. Alors que certains projettent de déréguler pour offrir notre pays à la finance, nous proposons l'inverse en interdisant à des secteurs clefs d'entrer en bourse. Parce qu'aujourd'hui, regardons le mal en face, la finance ne finance plus, c'est l'économie réelle qui finance la finance. La spéculation est devenue le tombeau du travail qui s'épuise pour ce petit jeu de spéculateurs. Nous devrons redonner toute sa force et tout son engagement à l'Etat pour qu'il puisse combattre ces nuisances publiques sans avoir les mains dans le dos.
Pour un réengagement de l'Etat contre les deux fléaux de notre temps, il n'y a qu'un vote, le vote communiste !
Le seul à avoir un projet d'avenir et à vous promettre de changer les choses !
Le seul parti à avoir programme autre que de supprimer tout ce qui a été fait et tout ce qui aide aujourd'hui des centaines de milliers de gens à vivre mieux.
Vive le Saphyr ! Vive le communisme !
De nombreuses acclamations et applaudissements s'ensuivirent. Ivan salua puis descendit de la scène pour saluer encore plus de monde et serrer leur main. Quelques minutes après, une chanteuse d'Urkaï avait fait le déplacement pour mettre l'ambiance au dernier meeting national. Ivan ne manqua pas de danser avec ses compatriotes et ses amis, ses camarades et notamment ceux qui l'avaient aidé à faire campagne. La fête se finit vers 23h.